"Il se dépouilla, prenant la condition du serviteur." Ph. 2,7

La croix glorieuse

La lettre aux Philippiens a été écrite autour de l’an 60, c’est-à-dire 30 ans après la mort et la résurrection de Jésus. Mais le passage que l’Église nous propose pour cette fête de la "Croix glorieuse" est une prière ou un chant liturgique (Ph. 2,6-11) que Saint Paul semble avoir emprunté à la liturgie du Baptême ou de l’Eucharistie.
Ce texte d’une poésie et d’une profondeur étonnantes représente donc la foi et la prière des tout premiers temps de l’Église.

"Le Christ Jésus, lui qui était de condition divine," une condition qui lui donnait le "droit d’être traité à l’égal de Dieu," n’a pas voulu "revendiquer son droit".
Il n’est pas venu parmi nous pour s’approprier quoi que ce soit, mais pour donner, et pour cela, "il se dépouilla de tout, prenant la condition de serviteur."
La première étape de ce dépouillement total a consisté à "devenir semblable aux hommes" … et, s’étant ainsi mis à notre portée, il est allé plus loin encore : "il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et à la mort sur une croix."
S’étant fait homme, le Fils de Dieu avait le pouvoir de donner sa vie… et cet homme qui avait tout donné "Dieu l’a élevé au-dessus de tout", il l’a élevé au dessus de toute créature.
Lui qui était Dieu éternellement, bien qu’il soit devenu l’un d’entre nous, retrouve la place qui était la sienne : "Dieu lui a conféré le Nom qui surpasse tous les noms." On sait que le "nom", dans le langage de la Bible, désigne souvent la "personne".
"afin qu’au Nom de Jésus, aux cieux, sur terre et dans l’abîme, tout être vivant tombe à genoux, et que toute langue proclame : Jésus Christ est le Seigneur, pour la gloire de Dieu le Père."
Paul cite le livre d’Isaïe, où Dieu parle en ces termes : "Devant moi tout genou fléchira et toute langue rendra gloire à Dieu …" (Is. 45, 23)
Paul sait bien que ce texte se rapporte à Yahvé, et il le cite en ce sens dans une autre de ses lettres (Rm 14,11). Il est donc bien conscient, dans ce passage de la lettre aux Philippiens, d’adresser à Jésus une profession de foi normalement réservée à Dieu !
Paul croit en Jésus comme on croit en Dieu : il est vraiment le Sauveur, et la foi en lui a le pouvoir de sauver les hommes : "Si dans ta bouche tu confesses que Jésus est Seigneur… tu seras sauvé." (Rm 10,9)

L’Évangile de Saint Jean, dans un langage différent, donne la même révélation : "Ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé (sur la croix) afin que tout homme qui croit obtienne par lui la vie éternelle." (Jn 3,14)
En étant élevé sur la croix, ce qui est, en fait, le suprême abaissement du Fils de Dieu, il donne aux croyants la vie éternelle.
"Dieu, en effet, a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas mais reçoive la vie éternelle." (Jn 3,16)
C’est par amour que le Père nous a donné son Fils, et c’est par amour que le Fils a fait l’offrande de sa vie : par ce geste, il nous donne le salut, et, en même temps, il nous supplie de nous laisser réconcilier et d’accueillir la vie éternelle pour laquelle Dieu nous a faits.

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