La Transfiguration et la passion

2ème dimanche de Carême de l'année A

La Transfiguration de Jésus est ce qu’on appelle une “théophanie” : une manifestation divine… elle a des points communs, mais aussi de grandes différences avec les théophanies de l’Ancien Testament.
Saint Matthieu nous dit qu’elle a lieu sur une montagne.
Cela rappelle les deux principales théophanies de l’Ancien Testament qui ont eu lieu sur une montagne : le Sinaï.
Sur le Mont Sinaï Yahvé avait parlé à Moïse et lui avait donné ses Commandements… et le seul personnage de l’Ancien Testament qui soit jamais retourné jusqu’à la “montagne de Dieu” est Elie : le prophète le plus prestigieux après Moïse… et à lui aussi, Yahvé s’était manifesté.

Or ici, sur la montagne, Moïse et Elie sont bien là : aux côtés de Jésus transfiguré.
On sait que saint Matthieu, qui adresse son Evangile à ses frères Juifs, multiplie les allusions qui leur présentent Jésus comme un Nouveau Moïse… mais bien plus grand que Moïse.

Moïse n’est pas seulement le plus grand prophète : celui qui a reçu la Loi de Dieu… il est aussi, sous l’autorité de Yahvé, le fondateur du Peuple de Dieu… il est son Guide charismatique… et il est le sauveur de son peuple : celui qui l’a sorti de l’esclavage.
Jésus est tout cela, mais bien mieux que Moïse, parce qu’il possède lui-même une autorité divine.
Moïse avait fondé le premier Peuple de Dieu… Jésus, lui-aussi fonde son Eglise (le Nouveau Peuple de Dieu)… mais il est plus qu’un fondateur : il est l’unique Sauveur qui lui apporte un salut éternel.

Le plus important, dans le Deutéronome (18,15), est une parole de Dieu relative à Moïse : Dieu dit : “C’est lui que vous écouterez.”… parole que tous les Juifs avaient retenue, et qu’ils observaient : ils observaient scrupuleusement la Loi de Moïse.
Et dans cet Évangile, il y a la même parole de Dieu, mais relative à Jésus : “Celui-ci est mon Fils… écoutez-le !”
On peut dire que c’est le seul commandement donné par le Père dans le Nouveau Testament : “Écoutez-le.”
Tout le récit de la Transfiguration aboutit à cette parole.

La Transfiguration nous révèle qui est Jésus… on nous le montre dans sa gloire divine… et en conclusion, Dieu nous dit : “Écoutez-le.”
Dieu ne dicte pas une liste de Commandements à Jésus comme il avait fait avec Moïse… il dit simplement : «Écoutez-le.»
Lui, il sait… il est “le Fils”.
Dans le langage de Saint Jean, c’est Jésus en personne qui est “la Parole de Dieu” (Jn. 1, 1-14 & I Jn. 1,1)… il est la révélation de Dieu.

Il est beaucoup plus grand que Moïse.
D’ailleurs, la voix de Dieu ne s’adresse pas à Jésus, mais aux trois disciples… elle s’adresse à l’Église : “Celui-ci est mon Fils bien aimé, en qui j’ai mis tout mon amour, écoutez-le !”

Dans les deux grandes théophanies de l’Ancien Testament, Dieu apparaît à Moïse et à Elie, et il leur parle.
Dans cet Evangile, remarquez bien que Dieu n’apparaît pas à Jésus… En fait, c’est lui, le “Fils bien aimé”, qui apparaît dans sa gloire divine !
Il est bien plus qu’un prophète : il est Dieu.

Pourquoi cet Évangile au début du Carême ?
Parce qu’il fait partie de la préparation à la Passion… on peut dire que c’est le premier épisode de la marche de Jésus vers Jérusalem et vers son sacrifice.
Jésus montre sa gloire au moment où il annonce sa Passion… ce que les disciples ne veulent pas entendre.
Dieu vient de leur dire : “Écoutez-le”… et la première chose qu’ils vont faire : ils vont refuser de croire dans l’annonce des souffrances de Jésus et de sa mort.
Nous qui avons parfois du mal à écouter l’Evangile… vous voyez que nous sommes en bonne compagnie… avec Pierre, Jacques et Jean !

Saint Paul à Timothée : “Prends ta part de souffrances pour l’annonce de l’Evangile.”
La fidélité à l’Evangile comporte une part de souffrances… cela, on n’aime pas trop !
Mais si on n’est fidèle à l’Évangile que là où il est facile, on n’est pas disciple du Christ.
Aimer ses proches est une des plus grande joies… mais si on cesse de les aimer quand cet amour devient lourd à porter, ce n’est plus de l’amour !

Même chose pour le témoignage : remarquez que saint Paul parle des souffrances pour l’annonce de l’Evangile.
Si on renonce à annoncer l’Evangile quand les choses nous semblent un peu difficiles… il est impossible d’être vraiment des témoins !
Cet Évangile est donc de circonstance pendant le Carême… il nous montre la gloire de Jésus… et il nous annonce ses souffrances.

Le Carême n’est pas, avant tout, un temps pour souffrir… c’est un temps pour aimer, quel qu’en soit le prix.
C’est un temps de partage, de pénitence et de prière… qui sont trois composantes de l’amour.
“Celui-ci est mon Fils… écoutez-le !”… invitation à la fidélité : éventuellement jusqu’au sacrifice… mais aussi : invitation à la prière.
Pas de vrai Carême si on ne donne pas plus de temps à la prière… et donc à la méditation de l’Evangile… l’Evangile est la parole du Christ : c’est la nourriture de la prière… le Père nous dit : “écoutez-le !”

Invitation à aimer la Parole de Dieu… à aimer toute Parole de Dieu… parce qu’elle est celle du Fils bien aimé… celui que Dieu nous donne comme frère aîné… qui nous aime avec tendresse et nous révèle ce qui est bon pour nous… sa loi n’est pas un fardeau… c’est le secret d’une vie pleinement réussie.
“Celui-ci est mon Fils bien aimé… écoutez-le !”
Tout ce qu’il nous dit, il nous le dit par amour.

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